Vous l’aurez compris à mes bidouillages récents sur la synthèse additive, à la réalisation d’un artichaut sonore avec un bout du cri de la girafe, je continue d’explorer des trucs autour de l’écoute, du bruit et de la musique. ALors évidemment, pour alimenter ces expérimentations, j’ai poursuivi mes lectures sur la musique. Voici donc quelques titres qui sont venus rejoindre les précédents sur mon chevet ces dernières semaines.
Tout est bruit pour qui a peur, de Pierre Albert Castanet
Sous-titré pour une histoire sociale du son sale, cet essai très dense emprunte son titre à Sophocle. Je suis loin de l’avoir fini, car il navigue entre sociologie, musicologie, et histoire récente. On y parle de bruit social, de bouleversement des idées, de musique institutionnelle, de musique populaire, de toutes les facettes du son-bruit. Le texte bouillonne d’exemples, un millier de portes ouvertes à qui veut explorer.
Filigrane n°7, intitulé Musique et bruit
La revue Filigrane (Musique, Esthétique, Sciences, Société) propose régulièrement, sous forme de recueil, une série d’articles sur un sujet commun. Ce numéro, datant du premier trimestre 2008 aborde la question de la musique et du bruit. Regroupés en deux parties, les premiers articles abordent à la fois l’aspect scientifique et historique du bruit. J’ai particulièrement aimé lire l’article intitulé « Anthropologie historique de la notion de bruit », qui fait écho à des idées explorées par Schafer dans son paysage sonore. La deuxième partie traite de la place du bruit dans le musique contemporaine. Une belle revue pour s’ouvrir l’esprit sur la notion de bruit.
Voyage de mon oreille, de Claude Ballif
Voilà aussi un livre qu’il faut prendre le temps de lire calmement. L’auteur nous accompagne dans son univers. Avec ce livre, on a l’impression de soulever le rideau, de voir e qu’il y a derrière la partition d’un compositeur de musique contemporaine. On ne parle pas ici de technique, mais de motivations, de construction de la beauté. Étourdissant.
La machine à écouter, essai de psycho-acoustique, E. Leipp
Publié en 1977, cet essai s’intéresse à ce qu’est le son d’un point de vue physique, et propose un modèle permettant de décrire comment l’humain perçoit, traite et analyse les sons, la musique. L’intuition pédagogique géniale de l’auteur, c’est d’assimiler un humain à un ordinateur, avec des capteurs, une unité centrale, etc. Alors certes, les modèles informatiques datent de la fin des années 70, mais je trouve l’ensemble très très accessible.
Le boucher du prince Wen-houei, de Bastien Gallet
Le volume est sous-titré enquêtes sur les musiques électroniques. Rempli de références à des artistes et albums qui jalonnent l’histoire de ces musiques, les pages retracent les différentes influences et connexions entre ces sonorités, à la place des techniques dans la création. Le livre est construit comme un collage de textes publiés précédemment par l’auteur, et permettent d’appréhender la problématique sous nombre de facettes différentes, depuis la technique jusqu’à des problématiques plus philosophiques, liées aux pratiques de ces musiciens…
Après de nombreux mois à lire sur la musique électronique, sur la manière de faire du son, et à utiliser des logiciels pour en faire, j’avais de plus en plus envie de me lancer dans la fabrication d’un synthétiseur logiciel. Pas un truc révolutionnaire, hein ! Mais quelque chose à visée pédagogique, pour apprendre comment faire du son, et le partager avec d’autres.
Dans cet article, je vous propose donc de découvrir ce qu’est la synthèse additive, en illustrant mes propos par quelques exemples générés par l’outil que je suis en train de développer, basicsynth.
Le son, c’est quoi ?
Le son, c’est le résultat de la compression puis décompression rapide de l’air (ou de tout autre matériau), que nos oreilles captent, et que l’on peut produire de plein de manières différentes : avec un instrument de musique, un haut-parleur, ou tout objet du quotidien. Pour réussir à en fabriquer avec un ordinateur, il faut prendre le temps de comprendre comment cela marche physiquement.
On peut représenter la compression/décompression successive de l’air par une courbe, où l’axe horizontal serait le temps, et l’axe vertical la quantité de pression, qui peut être négative ou positive. On appelle de telles représentations des oscillogrammes :
Plus le son est fort à nos oreilles, plus l’amplitude de la pression est importante. Dans l’exemple suivant, le son représenté en jaune est identique au son rouge, excepté son volume : il est beaucoup plus faible.
En plus du volume sonore, notre oreille apprend très tôt à distinguer les sons aigus des sons graves. Sur les oscillogrammes, c’est la longueur d’onde qui va varier. Quand la longueur d’onde varie, il n’y a bien sûr pas le même nombre d’oscillations par minute. C’est ce qu’on appelle la fréquence. On a par exemple pris l’habitude d’appeler la la note correspondant à une vibration de 440 oscillations par seconde. Sa longueur d’onde, usuellement mesurée en mètres, est donc équivalente à la distance parcourue par une vibration dans l’air en 1/440 seconde. Chaque note usuelle a ensuite sa fréquence. En les jouant successivement, on peut produire une mélodie.
J’ai du bon tabac, synthétisé par une méthode d’échantillonnage de sinus, très basique.
Pour fabriquer ce son, j’ai utilisé la technique de l’échantillonnage. Il s’agit du principe utilisé pour produire du son numérique : on découpe chaque seconde en 44100 intervalles (ce nombre a été fixé au moment de la commercialisation du CD), et on choisi une valeur numérique (correspondant à la pression, la mesure verticale) pour chaque échantillon :
Dans ce premier exemple, le son n’est pas très agréable : on dirait un buz, agressif, peu mélodieux. Il faut donc travailler pour améliorer ce son. La première chose à faire consiste à introduire une enveloppe. Le principe de l’enveloppe d’une note est de faire varier le volume de la note progressivement, pour imiter les sons tels qu’ils sont produits par les objets qui nous entourent. On peut par exemple faire monter progressivement le volume de la note, puis le diminuer progressivement, pour avoir un son très doux :
J’ai du bon tabac, synthétisé avec une enveloppe montante/descendante.
Dans cet exemple, chaque note est jouée avec sa fréquence fondamentale, mais le volume varie, comme illustré ci-dessous :
Dans l’univers de la synthèse musicale, on a pris l’habitude de décomposer l’enveloppe des sons en quatre parties : l’attaque, le déclin, le maintien, et le relâchement. En faisant varier l’amplitude et la durée de chacune de ces parties, on est capable de simuler grossièrement des sons proches de ceux entendus dans notre quotidien, qui sont souvent issus d’une première partie (frottement ou frappe), et d’une seconde partie plus ou moins longue.
Voici le même morceau que précédemment, mais joué avec une attaque et un déclin très prononcée (pour simuler une frappe), un très court maintien beaucoup plus faible, et un lent relâchement :
J’ai du bon tabac, synthétisé en simulant un son frappé, grâce à une enveloppe adéquate.
Cependant, dans la vraie vie, aucun instrument n’est capable de produire un son « pur ». Il y a toujours une foultitude de notes qui se mélangent, pour produire un son riche. Chaque instrument a été conçu pour produire un mélange spécifique de sons, pour chaque note jouée. C’est ce que l’on appelle le timbre de l’instrument. Or, quand on trouve un son harmonieux, c’est souvent que les sons qui viennent compléter la note fondamentale sont des notes dont la fréquence est un multiple de la note fondamentale. Ainsi, la première harmonique d’un la à 440 Hz est un son qui vibre à 2 × 440 = 880 Hz, la deuxième harmonique est un son qui vibre à 3 × 440 = 1320 Hz, etc. En synthèse additive, on peut donc ajouter à chaque fois que l’on joue une note quelques harmoniques, dont on construira une enveloppe beaucoup plus réduite, afin de garder la note fondamentale en avant, tout en l’enrichissant.
En rejouant la même partition que précédemment, et lui en ajoutant quelques harmoniques, voilà ce que l’on obtient :
J’ai du bon tabac, synthétisé en simulant de manière rudimentaire un son de piano, grâce à une enveloppe adéquate et des quelques harmoniques.
Et voilà, c’est tout pour aujourd’hui ! Si vous voulez vous aussi essayer de fabriquer du son avec mon petit synthétiseur pédagogique, rendez-vous sur la page du projet, où vous pourrez télécharger le synthétiseur ainsi que le script qui a servi à fabriquer les exemples que nous avons écouté. Le tout est écrit en python, et sous licence GPLv3.
Le week-end dernier, j’étais à Bruxelles avec Théo et quelques ami·e·s rencontré·e·s à Utopie Sonore, pour expérimenter autour de la réappropriation de l’espaces public, et de la création sonore. Nous avons convergé vers une forme d’artichaut sonore, à la fois poétique et politique. Pour préparer tout ça, nous étions accueillis à l’ADES’if, et nous logions au 123, deux lieux à découvrir, heureusement bien loin de l’ambiance des marchés de noël à la con.
Découvrez le projet sur le site du cri de la girafe, ou parcourez le mode d’emploi (juste en dessous) pour vous faire une idée des trépidations que nous avons vécues :
En septembre dernier, j’ai quitté Radio Campus Clermont-Ferrand. J’avais commencé là-bas en 2009, en participant à la Panthère Rouge, sur l’invitation de Lise. J’ai appris plein de choses, dans cette association, en occupant plein de missions : webmaster, technicien, animateur, interviewer, administrateur, président, trésorier… Une école du monde de la radio, et du monde associatif. Difficile d’arrêter si brutalement après 8 ans d’aventures.
C’est pourquoi dès la mi-2017, j’ai commencé à discuter avec quelques amis de plusieurs projets, pour continuer à vivre notre passion du faire ensemble. Et voilà, un premier projet est prêt à être partagé : le cri de la girafe !
Si le projet a mis du temps à démarrer, c’est parce que nous avions envie qu’il soit vraiment à notre image : nom, site internet, mais aussi autoportraits sonores, le premier défi que nous nous sommes lancés.
Une histoire commence, et nous, giraphones, sommes très heureuses de le partager avec tou·te·s !
La maladie de Batten est une maladie rare. Comme toutes les maladies rares, on a du mal à la comprendre. En fait, même les chercheurs ont du mal à bien la cerner.
Il y a peu en visite en Angleterre pour représenter VML à la BDFA Family Conference, j’ai eu envie de regrouper toutes mes notes sur la maladie, et d’en faire un site que j’espère pédagogique. Il maintenant disponible en ligne à l’adresse http://cln.jmfavreau.info/.
Connaissez-vous le bibi-binaire ? C’est un système de numération en base 16, inventé par Boby Lapointe (oui oui, le chanteur !), qui a pour but de faciliter l’écriture, la prononciation, et les opérations élémentaires sur les nombres. J’en avais déjà parlé il y a deux ans à l’occasion de la code week, où François Fabre avait présenté son super spectacle si le BIBI de BOBI m’était compté.
Avec François, on a longtemps discuté du manque d’outils pour écrire les chiffres bibi. Il y en a 16, avec des formes caractéristiques, mais très différentes des formes de nos chiffres usuels. Après de longues discussions, on est arrivés à la conclusion qu’il fallait une police de caractères (ou fonte) dédiée, où les caractères de 0 à 9, puis de A à F seraient remplacés par les caractères du bibi-binaire.
On a donc travaillé ensemble avec François, d’abord en dessinant les formes à la main, puis en utilisant inkscape, un logiciel libre de dessin vectoriel.
Une fois ce travail fait, nous avons utilisé fontforge pour dessiner la police. L’une des manières simple de faire, c’est de charger dans le logiciel une police que l’on aime bien (dans mon cas, DejaVu). On commence donc par supprimer tous les glyphes existants (sauf ceux nécessaires à l’écriture de calculs), on modifie les propriétés de la police (nom, auteur, licence), puis on importe chaque glyphe dessinés au format svg dans le logiciel.
Il est ensuite très important d’ajuster les espaces qui entourent chacun des glyphes, pour qu’un nombre complet soit composé avec équilibre et élégance.
Et voilà ! Si cette police de caractère vous intéresse, vous pouvez bien sûr la télécharger et l’utiliser librement, sous les clauses de la licence OFL : BibiBinaire.ttf. Bonne utilisation !
Quand on fait de la radio, du reportage ou de la création sonore, on utilise généralement un enregistreur pour capter les sons environnants, et on produit des fichiers son, au format mp3 ou wav. Il est rare que l’on ne doive pas les traiter avant de les diffuser : les découper, les assembler, corriger le volume, l’égalisation, faire un peu de compression…
Depuis deux ans, j’ai beaucoup appris sur ces questions, grâce aux copains de Radio Campus Clermont-Ferrand : Pierre, Enrico, Bruno et Théo partagent chaleureusement leurs connaissances. Merci à eux ! J’ai beaucoup appris, et je prépare prochainement une série de vidéos pour expliquer quelques-unes des techniques que j’ai pu apprendre au fil de mes créations sonores.
Mais avant de produire ces vidéos, j’avais envie de faire le tour de quelques logiciels que j’utilise, pour la production de ces créations sonores. Ce sont tous des logiciels libres, qui sont également accessibles gratuitement. Ils fonctionnent tous sous GNU/Linux, et certains fonctionnent aussi sur Windows ou MacOSX.
Logiciel de montage
Le logiciel le plus important, quand on assemble du son pour faire du reportage par exemple, c’est le logiciel de montage. Beaucoup de débutants commencent par audacity.
Audacity
C’est un couteau suisse très connu, car il est très simple, et fait bien son travail. Mais il a un gros défaut, si l’on fait du montage : toutes les modifications appliquées au son sont destructives. C’est-à-dire qu’elles sont définitives, et que l’on ne peut pas revenir en arrière : découpage, compression, égalisation modifient définitivement le son… C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai très vite arrêté d’utiliser cet outil. Sauf peut-être pour sa fonction de réduction de son, que je trouve très très bien faite :
Il faut bien sûr apprendre à utiliser cet outil avec parcimonie, car utilisé avec trop de force, il détériore nettement le signal que l’on veut garder…
Ardour
Très vite, on cherche donc à utiliser des outils plus complets. De plus en plus, dans les radios associatives, on invite les adhérents à télécharger reaper. Pour l’avoir vu utiliser, je le trouve très bien fait. Malheureusement, il n’est pas disponible sous GNU/Linux (sauf à utiliser wine), et n’est pas un logiciel libre, bien qu’on puisse le télécharger gratuitement.
En regardant ce qui existait autour de moi, et notamment grâce au super site Linux MAO (Musique Assistée par Ordinateur), j’ai découvert ardour.
On a la chance d’avoir sous GNU/Linux un écosystème très complet de logiciels, le tout coordonné par jack, un serveur de son en temps réel. Ardour s’intègre parfaitement dans cet environnement, et bénéficie de tous les avantages d’un fonctionnement très modulaire. Lui-même est d’ailleurs conçu pour faciliter l’édition multipistes, soit en traitant du son enregistré, soit en intégrant des pistes midi. À l’usage, je le trouve très pratique : normalisation automatique des pistes, édition de l’enveloppe par simple clic, gestion des bus, des groupes de piste, automation des effets, etc. Tout y est, ou presque. Et l’équipe de développement est très réactive. J’ai eu l’occasion de faire des rapports de bug qui ont très vite été pris en compte.
Plugins d’effet
Un logiciel de montage n’est rien sans des plugins efficaces et bien pensés. Ardour est livré avec quelques plugins très simples, qui font les choses habituelles (égalisation, réverb, etc.). Leur défaut principal est d’avoir une interface rudimentaire (Théo dit une interface informatique), alors que la plupart des plugins commerciaux proposent une interface qui ressemble à du matériel électronique : boutons à tourner, affichages digitaux, etc. Heureusement, il existe de nombreux plugins très bien faits, qui répondent à la plupart des besoins, et qui n’ont rien à envier aux solutions commerciales. Du moins ils comblent pleinement mes humbles besoin. Si vous cherchez quelque chose de ce type-là, regardez du côté des plugins dits lv2, et évitez les plugins LADSPA, qui viennent sans interface graphique.
Plugins Calf
Le premier ensemble de plugins que je vous inviterais à installer, ce sont les plugins proposés par le studio calf. Ils sont très très bien faits, très simple à prendre en main, et très bien documentés. Un simple parcours de la page principale du studio vous en convaincra. Pour ma part, j’ai beaucoup appris en regardant les vidéos proposées par l’équipe de Calf. Par exemple, la vidéo ci-dessous montre comment distordre des sons très simples pour en faire quelque chose de riche et complexe, à base de saturation, de réverbération, etc.
En allant loin dans l’utilisation de ces plugins, on peut par exemple mettre en place un vocoder au rendu très joli :
Guitarix
Ces premiers outils fournissent déjà beaucoup de possibilités, mais il arrive que l’on ait parfois besoin de « salir » le son, en l’amplifiant à la manière des amplis analogiques. Pour cela, les outils proposés par le projet guitarix offrent d’énormes possibilités.
ArtyFX
Le projet OpenAV développe une série d’outils pour le traitement sans latence du son : ArtyFX… Plutôt orienté live, ces outils peuvent également être utilisés comme outils dans ardour. Le manuel de ces plugins, disponible en français, donne une très bonne idée de l’ergonomie très bien pensée des outils…
Contrôle de la balance stéréo
Simuler une balance stéréo, cela implique de jouer à la fois sur le volume des deux pistes, mais aussi sur la différence de délai entre les deux canaux. Pour simuler ça, il m’arrive souvent d’utiliser le plugin stereo balance control de Robin Gareus. Vraiment impressionnant !
EQ10Q
Les outils d’égalisation de Calf sont très très bien. Il arrive aussi qu’on ait envie d’aller voir d’autres interfaces. EQ10Q est une alternative vraiment très belle et très facile à utiliser, qui fait aussi très bien son travail.
Plugins synthétiseurs
Il existe sous GNU/Linux de nombreux synthétiseurs de son. Pour la plupart, ils sont utilisables dans ardour, grâce au mécanisme des plugins. On créé une piste midi, on place des notes, puis on ajoute un plugin de synthèse de son, qui va interpréter les notes midi, et produire du son. Parmi ces outils, j’ai découvert récemment grâce aux superbes vidéos de Tobiasz Karoń le synthétiseur Helm, de Matt Tytel :
Le projet OpenAV, cité plus haut, propose lui aussi un synthétiseur, nommé sorcer. Je ne l’ai pas encore utilisé, mais il semble très intéressant.
Enfin, difficile de ne pas citer ZynAddSubFX, dont Tobiasz Karoń parle super bien, et qui semble hyper puissant…
Outils complémentaires
Jouer du son
Quand on a besoin de jouer du son en live, par exemple pendant une émission de radio, ou lors d’une soirée, on a là aussi pas mal d’outils à notre disposition. J’utilise depuis plusieurs mois le logiciel Mixxx, qui reprend les principes qui ont fait le succès du fameux Traktor : contrôle de la vitesse de passage des titres, détection des bpm, synchronisation des pistes, support des contrôleurs midi…
Analyse du son
J’avais déjà parlé ici de spek. C’est un outil super simple, mais rudement efficace, qui permet d’analyser un son en fréquence, à travers le temps. Indispensable à avoir dans sa caisse à outils…
Très simple à utiliser, il suffit de charger un son dans le logiciel, et voilà.
Conversion de format
Il arrive souvent que l’on ait à convertir du son : depuis du wav vers du mp3 pour une diffusion sur internet par exemple, ou encore depuis du flac vers du mp3, ou même depuis du mp3 vers du wav (car ardour ne supporte pas le mp3, c’est un choix des développeurs). Pour cela, j’utilise l’outil très simple sound converter, de GNOME. Je n’ai pour l’instant pas trouvé mieux. Il traite à la volée autant de fichiers que souhaité, en faisant une copie à côté des fichiers sélectionnés. De nombreux réglages sont possibles pour la qualité du format d’export. Le seul défaut du logiciel est qu’il faut aller dans les préférences pour ajuster ces paramètres : pas de réglages pré-établis pour les conversions usuelles…
Découpage de mp3
Le mp3 est un format de compression destructif du son : à chaque fois que l’on modifie un fichier mp3 et qu’on le sauve, il perd en qualité. Quand il s’agit d’extraire des parties d’un mp3, il existe heureusement des solutions pour ne pas détruire plus le son. J’utilise pour cela le logiciel mp3splt, qui a une interface graphique très simple et fonctionnelle, écrite en gtk.
Filtrage audio
Il y a peu, je suis tombé sur ce projet, que je n’ai pas encore eu l’occasion d’utiliser. Mais ça semble absolument génial. Il s’agit de faire de la séparation de source de manière interactive, en dessinant sur l’analyse spectrale d’un son. Le logiciel s’appelle ISSE, et c’est le résultat de la thèse d’Edward Diehl. Un outil à tester d’urgence ! Regardez la vidéo ci-dessous pour comprendre ce qu’est la séparation de sources, et ce que propose cet outil…
Conclusion
Voilà un petit tour personnel des outils existants sous GNU/Linux pour faire du son. Évidemment, j’ai présenté les outils que je connais, et je suis persuadé qu’il en existe de nombreux autres. Il faut aussi noter que le développement des logiciels libres pour la MAO est particulièrement dynamique ces derniers temps, et que ça risque de continuer à avancer toujours et encore… Restez vigilants, et lisez les actualités sur LinuxMAO pour vous tenir au courant !
Il existe dans la plupart des villes universitaires un IREM (Institut de Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques). À Clermont-Ferrand, je viens de rejoindre le groupe informatique sans ordinateur. Le principe du groupe est de concevoir des activités qui permettent à un enseignant de faire découvrir à ses élèves les fondements de la science informatique, mais sans passer par l’utilisation d’un ordinateur. Au menu des activités déjà réalisées : le binaire, les codes correcteurs d’erreurs, les automates, ou encore les algorithmes de tri.
Quand j’ai discuté pour la première fois avec l’équipe qui anime ce groupe de travail à l’IREM, je me suis demandé s’ils avaient envisagé d’adapter leurs activités pour des enfants déficients visuels. Et de fil en aiguille, c’est naturellement que j’ai eu envie de me lancer dans l’aventure…
Comme cette problématique d’adaptation des supports se rapproche un peu du savoir-faire des fablabs, et puisque les petits débrouillards Auvergne s’intéressent pas mal à la découverte de l’informatique sans ordinateur, nous avons décidé d’organiser une première soirée de réflexion autour du problème, dans leurs locaux.
Ça se déroulera donc lundi 13 novembre 2017, et c’est ouvert à toutes et à tous… Soyez les bienvenus !
Il existe plein de manières de démarrer une webradio. Certaines solutions clé en main polluent votre flux avec des publicités non désirées. D’autres solutions imposent d’avoir un ordinateur personnel qui fonctionne sans interruption à la maison. La solution que j’ai commencé à mettre en place n’a pas ces deux inconvénients. Mais commençons par expliquer ce qu’est une webradio, et comment ça fonctionne.
Qu’est-ce qu’une webradio ?
Une webradio, c’est une radio que l’on écoute grâce au web. Elle est disponible aux auditeurs sous forme d’un flux de son, généralement au format mp3, qui peut être soit lu dans un logiciel ou une application dédiée, soit depuis un site internet, soit grâce à un poste de radio internet (ou radio wifi, quelque chose qui se démocratise de plus en plus).
Quand on créé une webradio, on doit donc être capable d’envoyer le flux de son vers le poste de chacun des auditeurs. Cela veut dire que le serveur de diffusion doit avoir une bande passante assez conséquente, pour pouvoir accueillir tous les auditeurs, comme l’illustre le schéma ci-dessous. Clairement, une connexion ADSL ne suffit pas, il faut louer les services d’une entreprise qui dispose de serveurs à grande bande passante.
Le serveur de diffusion reçoit quant à lui le son depuis un multiplexeur, un outil qui permet de choisir (ou de mélanger) les sources : soit on propose un direct depuis un studio, soit on diffuse de la musique qui a été programmée. Chacune de ces trois connexions n’étant pas trop gourmande, on peut alors installer au besoin ces serveurs derrière une connexion normale, même ADSL.
La plupart du temps, sauf pour des raisons pratiques, on va choisir d’installer la partie programmation, multiplexage et diffusion sur le même ordinateur, le même serveur physique, installé dans un datacenter. La partie prise d’antenne en direct se réalise généralement depuis un studio en ville.
Et c’est là qu’intervient airtime, qui est un logiciel pilotant liquidsoap, cet outil polyvalent qui fabrique un flux de son à partir de multiples sources. L’interface d’airtime permet de choisir les morceaux qui passeront, et liquidsoap les assemble pour les envoyer ensuite à un logiciel de diffusion, comme icecast par exemple.
Une solution à base d’airtime
Il y a deux ans, j’avais aidé Radio Campus Clermont-Ferrand à déployer une solution d’automation avec airtime. Depuis ce temps, l’entreprise à l’origine de ce logiciel a arrêté de publier les nouvelles versions sous licence libre… À cette occasion, j’avais co-signé une lettre à la communauté pour motiver l’arrivée d’un fork, libretime. Aujourd’hui, libretime est encore en version alpha, aussi je vous invite fortement à préférer pendant quelques temps les versions produites du temps d’airtime.
Configuration du système
Pour pouvoir faire fonctionner sans surprise airtime 2.5.x, il est conseillé d’installer une Ubuntu 14.04 (trusty) 64 bits. Pour ma part, j’ai choisi de prendre un serveur chez Scaleway, à 3 euros par mois c’est très raisonnable. C’est je pense le prix minimum à payer pour avoir une solution complètement indépendante de toute publicité, et pour maîtriser toutes les briques logicielles du streaming.
Attention cependant, cette version d’ubuntu a une version de silan défectueuse : elle se trompe dans le calcul de la durée des morceaux. Il faut donc la remplacer par une version proposée par l’entreprise qui développe airtime :
Puis on se rend dans le répertoire libretime ainsi créé, et on lance l’installation :
cd libretime
sudo ./install
L’outil d’installation se charge d’installer les paquets manquants, pour rendre fonctionnelle la machine.
Configuration d’airtime
Pour régler correctement airtime, il est nécessaire d’aller dans l’onglet Système, puis de régler le flux de sortie.
Airtime est installé avec icecast, logiciel qui se charge de faire la diffusion du flux vers les auditeurs. Il suffit donc de régler airtime pour qu’il envoie le flux qu’il produit à l’instance d’icecast installée sur le même serveur. Sur la capture d’écran ci-dessus, c’est le panneau droit qui permet de faire cela. On peut d’ailleurs régler plus d’un flux, par exemple pour avoir différentes qualités d’encodage, ou différents formats (mp3, ogg).
Programmation d’airtime
Ensuite, on téléverse des morceaux dans airtime, puis on créé des blocs intelligents, des listes de diffusion, et enfin des émissions dans le calendrier. Et puis on glisse des listes de diffusion dans les émissions, et c’est prêt à jouer ! Pour plus de détails, je vous propose de consulter la documentation que j’avais écrite pour Radio Campus France à ce sujet.
Petits réglages
Si on a oublié d’installer la version corrigée de silan, les titres joués par airtime seront coupés à la moitié de leur durée à chaque diffusion. On peut alors installer la bonne version de silan, puis utiliser airtime-re-silan, un petit script que j’ai écrit pour corriger les durées des titres déjà importés dans airtime…
À suivre…
Vous l’aurez sans doute compris en lisant ce billet, avec une paire de potes on se lance dans la création d’une webradio, pour ne pas tomber dans la dépression post Radio Campus. Affaire à suivre, donc !
Au fil de mes lectures sur le son, je suis très souvent tombé sur la référence à cet essai de Jacques Attali, sous-titré Essai sur l’économie politique de la musique, dont la première édition date de 1977. Jusqu’à présent, j’avais choisi de ne pas lire ce texte, parce que l’idée que je me faisais de l’auteur, et les autres livres de lui que j’avais eu sous la main m’avaient plutôt fait fuir. Et puis à force de le lire comme une référence, je me suis finalement laissé tenté par cette lecture.
Le livre que j’ai entre les main est une nouvelle édition datant de 2001. J’avais peur que l’auteur n’affirme des faits sans références. Je me trompais, l’ouvrage est bien documenté. Il raconte l’histoire de la musique du point de vue économique et politique : le va et vient constant entre musique contrôlée par les puissants et musique du peuple, les débuts de la propriété intellectuelle, de la commercialisation, l’histoire du support d’enregistrement, et sur la fin la dématérialisation.
C’est finalement un ouvrage que je trouve intéressant, si l’on choisi de focaliser notre lecture sur l’objet premier annoncé par le sous-titre, en dépassant les avis personnels de l’auteur.
Histoire de la musique, Jacqueline Jamin
Quand on se promène aux puces, on tombe parfois sur des livres improbables comme celui-ci. Comment pensait-on l’histoire de la musique en Europe en 1966 ? Fortement ancrée en Europe, évidemment, marquée par des affirmations puissantes : tel courant est marqué par Tel et Tel compositeur. Très bien illustré en noir et blanc, avec photos de représentations de théâtre classique, reproduction de portraits de compositeurs, ce bouquin nous amène jusqu’aux portes de la musique contemporaine et du jazz, en prenant le temps de raconter la musique des civilisations anciennes, le moyen-âge, la renaissance (évacuée en 2 pages), l’époque classique, le romantisme, et la seconde moitié du 19e siècle 20e siècle. Le tout marqué par cette assurance catégorique et professorale qui laisse peu de place à une histoire alternative. C’est beau, c’est drôle, et ça fait un bon recueil de classiques… Ah oui, on parle en quelques pages de la musique des civilisations orientales, aussi.
Musiques actuelles, musique savante, quelles interactions ?
Avec mon exploration de la naissance de la musique électronique, je me suis aperçu que les musiques actuelles et la musique contemporaine utilisant les supports électroniques avaient très peu en commun. Bien sûr, certains musiciens de techno actuels puisent une partie de leurs influences chez des gens comme Pierre Boulez par exemple, mais ce n’est pas l’histoire du mouvement musical où ils appartiennent. Les deux histoires semblent s’être construites en parallèle. J’avais donc très envie de lire cette série d’entretiens, réalisés réunis et présentés par Éric Denut, et intitulés Musiques actuelles, musique savante, quelles interactions ?. Le recueil date de 2001, mais en le parcourant on trouve des propos qui alimentent nombre de clichés : là un compositeur hautain et méprisant envers la culture des producteurs de musique techno, là un compositeur attiré par l’exotisme et qui au contraire cherche à se dévergonder…
L’avant-propos, de Danielle Cohen-Levinas invite à la réflexion : pourquoi les festivals et rencontres qui proposent au public de la musique contemporaine cherchent avant tout à faire vibrer la fibre de la curiosité chez un public qui peine à venir ? Pourquoi proposer des programmes éclectiques au point qu’aucune cohérence ne puisse être lue par le spectateur ? Bien sûr, on comprendra la stratégie des programmateurs, mais combien de publics passent à côté de ce qui pourrait les faire vibrer, précisément parce que l’argument de curiosité les fait fuir ?
Voyage de mon oreille
C’est un texte assez ardu, je trouve, mais dont l’objet a beaucoup motivé ma lecture : essayer de comprendre les réflexions, les démarches, les constructions qui guident le travail d’un compositeur de musique contemporaine. On y lit des questionnements autour de la frontière entre artisan et artiste, un travail sur le temps, une recherche permanente de nouvelles manières de penser la musique. Très enrichissant.
Depuis plus d’un an maintenant, je suis devenu auditeur d’émissions sur France Musique. Pas pour mettre du classique en musique de fond, hein, vraiment des émissions que j’écoute en podcast, avec grand intérêt. Il y a de ça 5 ans en arrière, je n’aurais pas imaginé ça…
Comme beaucoup de gens de ma génération, j’ai grandi avec la radio. Chez mes parents, mes grands-parents, France Inter était diffusé quasiment toute la journée sur le poste de radio de la cuisine. À tel point qu’encore aujourd’hui, je me souviens de la musique du jeu des mille francs avec un certain pincement au cœur, parce que c’était le moment où il fallait ranger les jeux, pour se préparer à la fin de la journée… Je pense que j’ai eu mon premier poste de radio vers 10 ou 12 ans. J’ai joué à chercher toutes les stations, j’écoutais au hasard de la bande FM des trucs. Plus tard, avec l’adolescence, j’ai découvert les radios commerciales majeures de ma génération, Fun Radio, NRJ et Sky Rock. On enregistrait des K7 de best-of, avec les titres du moment, pour les réécouter ensuite.
Plus tard, j’ai découvert Nova, Radio FG, ou encore Canal B quand j’étais à Rennes. Et puis en arrivant à Clermont-Ferrand, je me suis mis à faire de la radio.
France Culture
Difficile de faire de la radio si on n’écoute pas ce que font les autres. Les détracteurs de l’émission science alors ! que j’avais animée avec Cécile et Claire nous reprochaient de « faire du France Culture ». Jusqu’alors, j’avais la conviction que je ne me retrouverais pas dans les programmes de France Culture. À chaque fois que je tombais sur une émission proposée en podcast sur les réseaux sociaux, le sujet me captivait, je trouvais ça super. Mais je n’osais pas prendre le temps d’aller explorer la grille. Alors petit à petit, j’ai pris mes habitudes, plutôt en podcast d’ailleurs : la fabrique de l’histoire, du grain à moudre, les carnets de la création, création on air…
France Musique
Et puis il y a un peu plus d’un an, je suis tombé par hasard sur le cri du patchwork. Clément Lebrun propose dans son émission hebdomadaire de parcourir la production musicale sous un angle à chaque fois renouvelé, qui interroge la place du son dans la création sonore. On y retrouve de la musique contemporaine, de la musique classique, mais aussi des musiques actuelles, du field recording, etc. À l’occasion du festival longueur d’ondes en 2017, j’avais pu assister à un échange avec Clément Lebrun, qui avait encore renforcé mon plaisir à écouter cette émission. Voici par exemple un épisode, le premier d’une série de 5 émissions consacré au brut :
À la rentrée 2017, une nouvelle émission vient de rejoindre la grille de France Culture, il s’agit de l’expérimentale. Produite par le GRM, dont j’avais parlé dans un précédent billet, cette émission est déclinée chaque semaine du mois en une forme différente : entretiens, archives, ou encore rediffusion de concerts, le tout avec l’envie d’écouter les artistes explorer le son. Musiques électroacoustiques, concrètes, électroniques, d’avant-garde ou même improvisées sont au programme. C’est l’émission consacrée au field recording qui a attiré mon attention sur l’émission, puis j’ai écouté ensuite celle consacrée à Pierre Henri. Une belle porte d’entrée dans l’univers de ce créateur de sons :
Il y a quelques mois, j’avais participé à l’API hour 23 organisé par Clermont’ech. Il s’agit de soirées où des intervenants présentent rapidement une notion technique ou scientifique, un lieu d’échange très convivial. Par chance, ces interventions sont filmées, et c’est comme ça qu’après quelques temps, on retrouve une vidéo sur les internets, avec ma tête dessus…
Mon intervention s’intitulait Manipuler des images médicales : de l’IRM à l’écran, et la courte description disait Qu’est-ce qu’une image médicale, comment peut-on la stocker et la manipuler ? Petit tour d’horizon des solutions techniques, depuis le format DICOM jusqu’au logiciel graphique slicer3D, en passant par les bibliothèques ITK et dcmtk.
À l’occasion d’Utopie Sonore 2017, nous avons participé avec Théo et Noémie à l’une des invitations à création proposées par les organisateurs de cette rencontre. L’année précédente, nous avions déjà œuvré avec Théo en proposant une réalisation sur le thème la présidentielle n’aura pas lieu.
Cette année, deux thèmes proposés ont attiré notre attention : Noir polar, et transpécisme. Avec l’animation des premiers jours à Utopie Sonore, où les humains apprenaient à cohabiter entre eux, et avec les animaux des lieux, nous avons très vite choisi notre sujet : la « prise de bec » entre Conrad, le coq des lieux, et Zoé, arrivée avec son père pour la fin de semaine. Une anecdote qui a d’ailleurs inspiré plusieurs participants, comme on le constatera en écoutant les autres réalisations sur la page de restitution d’US 17.
La difficulté, comme l’année dernière, a été de réussir à trouver du temps pour travailler sur le projet : réflexion et écriture, puis prises de son, entretiens, et enfin montage, et mix. Nous avions choisi de ne pas dire à Zoé ou à son père le sujet de notre réalisation, et avons donc réalisé des interviews en orientant nos échanges, et en laissant le hasard faire émerger les propos et expressions qui nous intéressaient. Puis, en laissant traîner les micros un peu partout, nous avons assemblé du matériau sonore…
Nous avons aussi puisé dans nos archives personnelles pour émailler notre création de textures et de sons qui évoquent l’ambiance des films noirs… Et puis on s’est fait plaisir, et on a puisé dans nos archives d’Utopie Sonore 2016… pour retrouver une interprétation très réaliste d’une poule par Julien. Caché au milieu des réels chants de coqs, il est peu probable que vous l’identifiez à première écoute…
On peut retrouver sur le programme initial les contraintes imposées sur le fond et la forme. Au delà du manque de temps, qui nous a fait réaliser ce projet un peu à la va-vite, on regrette avec Théo de ne pas avoir eu le temps de préparer une interprétation live… L’année prochaine, on prendra le temps !
Merci à Geneviève pour la photo de Conrad en tête de cet article !
Cette année à Utopie Sonore, il y a eu pas mal d’installations et de performances présentées. Certaines réalisées à l’avance, d’autre construites pendant les quatre jours à la cour des Aulnays. Évidemment, il était impossible d’assister à toutes les propositions, car les journées étaient bien remplies : participation aux tâches collectives, animation et participation à des ateliers, travail de montage pour participer aux appels à contribution…
Parmi les installations que j’ai vu, je crois que c’est Transmerdunor qui m’a le plus marqué. On nous l’avait présenté comme une expérience comme prendre du LSD. Les deux protagonistes s’étaient enfermés dans une pièce du manoir, et pendant la première journée et la première nuit, on n’a rien pu voir, rien pu entendre. On les a vu traverser la cour des Aulnays en long, en large et en travers, ramenant dans leur nid des tuyaux, des objets, des bidules. Et puis enfin on a pu rentrer. 8 tuyaux qui diffusent du son, agencés pour immerger complètement l’auditeur dans un univers intriguant, variant, parfois silencieux,
parfois hyperflippant, souvent drôle. Et des jeux de lumière, sublimes mécaniques délicates, pour accompagner le puzzle sonore. Un truc complètement dingue.
Juste en sortant du Transmerdunor, on tombait sur un projet du collectif Étrange Miroir, intitulé Téléphones sauvages. Un dispositif d’écoute très réussi, avec des téléphones à cadran rotatif pour choisir la piste à écouter, et un projet audio vraiment très chouette : des discussions téléphoniques en tout genre, empreinte absurde de nos échanges avec les standards téléphoniques.
Il y a eu aussi le projet Éponges d’une nuit d’été, un projet collectif proposé par Leslie Doumerc & Arthur Lacomme. Les participants d’Utopie Sonore étaient invités à enregistrer leurs premiers mots du matin, autour du rêve. Un groupe a ensuite travaillé à mettre en forme une restitution mêlant enregistrements de voix, et sons produits en direct. Le résultat était drôle et captivant.
L’année dernière déjà, la radio cousue main était là. Cette année, c’était une radio cousue main à distance, depuis Istambul, et la Little Syria, pour une représentation en direct à travers les internets très émouvante.
Un peu plus loin dans la cour, dans un ancien bâtiment un peu délabré, en pierre, et joliment rebaptisé les ruines de la révolution, un rideau, et un nom intriguant : le Sonomate. Chacun était invité à y aller seul, et à découvrir le dispositif. Installé sur une table, un boîtier en bois et en verre, duquel sortaient un interrupteur et un micro. La curiosité invitait à presser le bouton. Une lumière et un mécanisme s’activaient. À l’intérieur du boîtier, un tic-tac sonore, produit par un minuteur, et un enregistreur k7. Vous aviez quelques dizaines de secondes pour y laisser votre message. Le résultat est surprenant, poétique, drôle, multiple, à l’image des quatre jours.
Et puis, un des moments que j’ai le plus aimé, c’est l’écoute collective de créations sonores, pendant toute la nuit, dans la chapelle. Des matelas, des canapés, des fauteuils, et des gens dans des duvets, à regarder la charpente voûtée de ce superbe volume.
Il y a eu plein d’autres choses encore, que l’on peut retrouver sur la page des restitutions de l’édition 2017 d’Utopie Sonore !
Cette année à Utopie Sonore, il y avait des petits nouveaux, et puis pas mal de participants à l’édition précédente, qui avaient envie de revivre un beau moment. J’avoue, j’étais impatient de les retrouver tous : les gens du Bruitagène, les Bruxellois, les copains des radios locales d’un peu partout (Radio Vassivière, Radio Saint Ferréol), les p’tits jeunes du Créadoc, ceux de Radio Friture, et toute la foultitude de fondus de sons que nous étions.
Le premier jour, point de mulot à la cour des Aulnays ! Mais le lendemain, heureusement, France Museau était là, avec dans sa besace un disque récemment pressé, comme une empreinte physique d’un projet qui jusqu’ici n’avait été qu’ondes. Édité chez Warm, l’album s’intitule Wave 91,6. On y retrouve les mêmes collages étranges et poétiques que ceux de la radio, compositions où se superposent musiques aériennes, ambiances intriguantes et prises de son volées du réel. Le disque a cependant quelque chose de plus dansant, plus musical, au sens commun du terme.
Allez tendre une oreille à ce projet sur le bandcamp, pour vous faire une idée. Et puis commandez le disque, il est beau !
À l’occasion d’Utopie Sonore 2017, on a proposé avec Théo deux ateliers, dont le premier s’intitulait ch’ai faire, ch’ai dire.
Cela faisait quelques temps que je peaufinais cette idée, après les lectures sur le son, et en particulier après avoir beaucoup appris sur les travaux de Pierre Schaeffer, en lisant Michel Chion et Murray Schafer. Le principe de l’atelier était de construire collectivement un ensemble d’outils pour décrire les sons.
Déroulé de l’atelier
Nous avons organisé l’atelier en deux séances d’une heure trente, séparées d’une pleine journée. Pendant la première séance, nous avons commencé par un tour de table, où chacun a témoigné de son rapport à la description du son (pratique du solfège ou de la musique, créateurs de contenu radiophoniques, intérêt pour la voix…). Puis avec Théo nous avons amené les participants à découvrir la notion d’objet sonore, en soulignant l’importance de faire abstraction de la manière dont le son avait été produit.
On a ensuite commencé à faire une liste d’adjectifs, que l’on a vite regroupé en groupe cohérents (hauteur, intensité, …), puis on a commencé à écouter des sons qui avaient été collectés dans la journée précédente avec Théo. Le groupe a tranquillement convergé vers un ensemble d’outils, à vrai dire assez semblables à ce qu’a proposé Pierre Schaeffer : décomposer le son en attaque, corps et chute, décrire chaque partie avec la hauteur, l’intensité, la texture, la masse, le timbre harmonique, et introduire la notion de dynamique…
Arrivés à la fin de cette première séance, chacun à donné à son voisin la description d’un son, à l’aide de ce vocabulaire que nous avions construit en commun. La consigne était de revenir à la séance suivante avec l’enregistrement d’un objet sonore correspondant.
La deuxième séance a été l’occasion d’affiner notre pratique de la description, puisque nous avons écouté collectivement les sons récoltés, en tentant de les décrire, avant de confronter cette description aux consignes obtenues.
Quelques ressentis
Je crois que l’atelier a été un vrai succès, tous les participants ayant pris un grand plaisir à échanger et à construire ensemble un vocabulaire de description abstrait.
Plusieurs participants ont exprimé leur satisfaction à avoir pratiqué une écoute comme ils ne l’avaient jamais fait. Au début de l’atelier, l’espoir avait été exprimé de pouvoir converger vers du vocabulaire permettant de trier sa banque de sons personnels. Nous avons constaté à la fin de l’atelier que ça n’était pas nécessairement l’outil idéal pour cela, mais qu’il permettait plutôt de faciliter la composition de musique électroacoustique.
Nous avons la chance d’avoir à l’occasion d’Utopie Sonore des participants passionnés de son, curieux, et avec l’envie de faire ensemble. Pas sûr que cet atelier marche aussi bien à chaque fois… Affaire à suivre.
L’année dernière, on vivait pour la première fois l’utopie sonore : une parenthèse dans l’été, pour vivre à cent le son. De superbes rencontres, prolongées tout au long de l’année à SONOR#9, à Longueur d’ondes, au Forum ouvert de l’éducation aux médias, ou au hasard des routes d’Auvergne et d’ailleurs…
Avec Théo et Noémie, on en parlait depuis des mois : l’édition 2017 d’Utopie Sonore, on en serait, on ferait la route ensemble, et cette année serait aussi géniale que l’année précédente. Vous savez quoi ? Bah ça s’est passé exactement comme ça !
Ça a bien sûr commencé par des retrouvailles entre Théo et la cuve qui l’année dernière avait été le support de notre atelier, et dont les enregistrements ont alimenté toutes les créations de Théo pendant une année. Je ne pouvais pas manquer de faire une interview croisée entre les deux compères :
Cette année, l’équipe organisatrice de l’événement a mis les petits plats dans les grands, en poursuivant tout le meilleur de l’année dernière, et en l’enrichissant de nouvelles idées, de nouvelles installations et dispositifs. Cette année, il y avait par exemple de la bonne bière locale, il y avait une somptueuse ambiance lumineuse, des tentes en dôme sont venues compléter les espaces existants, l’événement a duré un jour de plus. On a pu en profiter à fond, et notamment de la bibliothèque éphémère partagée, où chacun était invité à amener ses livres sur le son, la politique et la poésie…
Cette année encore, les journées ont été ponctuées d’ateliers, très riches en échanges, de performances et installations absolument géniales, des discussions passionnantes, des repas végétariens succulents… Les organisateurs ont commencé à compiler sur le site de l’événement les restitutions, audio et photos. Allez y jeter une oreille et un œil, vous pourrez ressentir un peu de la belle énergie qui s’y est développée.
Comme l’année dernière, cet interlude à partager quatre jours avec plein de gens, dans une belle énergie positive, d’entraide, d’apprentissage mutuel et de créations collectives, cet interlude a regonflé mes batteries à bloc. Prêt pour une nouvelle année !
Dans les jours qui viennent, je continuerai à raconter ici quelques moments forts qui m’ont marqué :
De passage dans une colloc à Marseille, je suis tombé sur une bibliothèque avec plusieurs bouquins intéressants autour du son. Et puisque c’est encore les vacances, j’en ai profité pour passer une journée à bouquiner… Je prolonge donc ici la série revue de lecture autour du son…
Le sonore, l’imaginaire et la ville
Henry Torgue est à la fois compositeur et chercheur en urbanisme. Dans cet ouvrage, et croise ses deux expériences de vie pour questionner la manière dont l’espace (urbain, scénique) est approprié et appropriable d’un point de vue sonore. Il cite bien sûr Murray Schafer, mais explore aussi des problématiques plus proches de la composition, ou encore de l’architecture.
À l’écoute du XXe siècle
Alex Ross propose dans ce livre de plus de 700 pages une histoire de la musique du XXe siècle. Plutôt focalisé sur la musique savante, il aborde bien sûr les différents chemins qui ont mené à la musique contemporaine, qu’elle soit sérielle ou concrète. Il aborde l’importance de la place de l’enregistrement et de la radio dans la diffusion des œuvres, et dans la pratique musicale. L’un des intérêts notables cette promenade réside en les analyses très accessibles d’un certain nombre de pièces et morceaux fondateurs de la musique du XXe siècle.
La spatialisation des musiques électroacoustiques
La musique électoacoustique a très tôt été explorer la problématique de la spacialisation, ou comment ajouter une nouvelle dimension aux possibilités de l’écoute. Dans ce recueil d’articles très complet, on lit différents point de vue de chercheurs et musiciens en son, sur la question de la spatialisation, à la foi d’un point de vue théorique, mais également d’un point de vue pratique, avec un certain nombre de plans d’acousmoniums, ainsi qu’une présentation pédagogique de leur fonctionnement. En lisant ces textes, on comprend un peu mieux le défi auquel se confrontent les spatialisateurs, qui sont les techniciens de diffusion de ces œuvres, parfois composées en stéréo, parfois en polyphonie.
Il y a quelques temps, j’écrivais ici combien j’aimais la musique électronique, et combien j’avais aimé lire Les fous du sons, de Laurent de Wilde. Comme le sujet m’intéresse, j’ai eu l’occasion de lire plusieurs livres, d’écouter des conférences et des podcasts sur la question, ou encore d’assister à des conférences.
Plutôt que de laisser toutes ces idées se dissoudre petit à petit, je me suis dit qu’il fallait que je prenne des notes pour structurer tout ça. Et quoi de mieux pour ça que d’utiliser une carte mentale dynamique, pour naviguer au cœur de ces concepts, références, vidéos et liens de tout type.
En cherchant un peu, j’ai trouvé la bibliothèque javascript D3.js, qui comporte énormément de possibilités d’ajustement. Avec un peu de json pour stocker les informations, et bootstrap pour la mise en page… Le projet, en ligne sur github, pourrait être facilement cloné pour décrire la carte mentale d’un autre sujet. Il y a sans doute quelques spécificités dans le fichier html et dans le javascript, mais c’est je pense très simple à dériver.
N’hésitez pas à aller y faire un tour, pour y picorer des idées, et en proposer d’autres ! C’est en particulier là-bas que je continuerai à raconter la folle histoire du qui est-ce tactile.