Connaissez-vous le bibi-binaire ? C’est un système de numération en base 16, inventé par Boby Lapointe (oui oui, le chanteur !), qui a pour but de faciliter l’écriture, la prononciation, et les opérations élémentaires sur les nombres. J’en avais déjà parlé il y a deux ans à l’occasion de la code week, où François Fabre avait présenté son super spectacle si le BIBI de BOBI m’était compté.
Avec François, on a longtemps discuté du manque d’outils pour écrire les chiffres bibi. Il y en a 16, avec des formes caractéristiques, mais très différentes des formes de nos chiffres usuels. Après de longues discussions, on est arrivés à la conclusion qu’il fallait une police de caractères (ou fonte) dédiée, où les caractères de 0 à 9, puis de A à F seraient remplacés par les caractères du bibi-binaire.
On a donc travaillé ensemble avec François, d’abord en dessinant les formes à la main, puis en utilisant inkscape, un logiciel libre de dessin vectoriel.
Une fois ce travail fait, nous avons utilisé fontforge pour dessiner la police. L’une des manières simple de faire, c’est de charger dans le logiciel une police que l’on aime bien (dans mon cas, DejaVu). On commence donc par supprimer tous les glyphes existants (sauf ceux nécessaires à l’écriture de calculs), on modifie les propriétés de la police (nom, auteur, licence), puis on importe chaque glyphe dessinés au format svg dans le logiciel.
Il est ensuite très important d’ajuster les espaces qui entourent chacun des glyphes, pour qu’un nombre complet soit composé avec équilibre et élégance.
Et voilà ! Si cette police de caractère vous intéresse, vous pouvez bien sûr la télécharger et l’utiliser librement, sous les clauses de la licence OFL : BibiBinaire.ttf. Bonne utilisation !
Quand on fait de la radio, du reportage ou de la création sonore, on utilise généralement un enregistreur pour capter les sons environnants, et on produit des fichiers son, au format mp3 ou wav. Il est rare que l’on ne doive pas les traiter avant de les diffuser : les découper, les assembler, corriger le volume, l’égalisation, faire un peu de compression…
Depuis deux ans, j’ai beaucoup appris sur ces questions, grâce aux copains de Radio Campus Clermont-Ferrand : Pierre, Enrico, Bruno et Théo partagent chaleureusement leurs connaissances. Merci à eux ! J’ai beaucoup appris, et je prépare prochainement une série de vidéos pour expliquer quelques-unes des techniques que j’ai pu apprendre au fil de mes créations sonores.
Mais avant de produire ces vidéos, j’avais envie de faire le tour de quelques logiciels que j’utilise, pour la production de ces créations sonores. Ce sont tous des logiciels libres, qui sont également accessibles gratuitement. Ils fonctionnent tous sous GNU/Linux, et certains fonctionnent aussi sur Windows ou MacOSX.
Logiciel de montage
Le logiciel le plus important, quand on assemble du son pour faire du reportage par exemple, c’est le logiciel de montage. Beaucoup de débutants commencent par audacity.
Audacity
C’est un couteau suisse très connu, car il est très simple, et fait bien son travail. Mais il a un gros défaut, si l’on fait du montage : toutes les modifications appliquées au son sont destructives. C’est-à-dire qu’elles sont définitives, et que l’on ne peut pas revenir en arrière : découpage, compression, égalisation modifient définitivement le son… C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai très vite arrêté d’utiliser cet outil. Sauf peut-être pour sa fonction de réduction de son, que je trouve très très bien faite :
Il faut bien sûr apprendre à utiliser cet outil avec parcimonie, car utilisé avec trop de force, il détériore nettement le signal que l’on veut garder…
Ardour
Très vite, on cherche donc à utiliser des outils plus complets. De plus en plus, dans les radios associatives, on invite les adhérents à télécharger reaper. Pour l’avoir vu utiliser, je le trouve très bien fait. Malheureusement, il n’est pas disponible sous GNU/Linux (sauf à utiliser wine), et n’est pas un logiciel libre, bien qu’on puisse le télécharger gratuitement.
En regardant ce qui existait autour de moi, et notamment grâce au super site Linux MAO (Musique Assistée par Ordinateur), j’ai découvert ardour.
On a la chance d’avoir sous GNU/Linux un écosystème très complet de logiciels, le tout coordonné par jack, un serveur de son en temps réel. Ardour s’intègre parfaitement dans cet environnement, et bénéficie de tous les avantages d’un fonctionnement très modulaire. Lui-même est d’ailleurs conçu pour faciliter l’édition multipistes, soit en traitant du son enregistré, soit en intégrant des pistes midi. À l’usage, je le trouve très pratique : normalisation automatique des pistes, édition de l’enveloppe par simple clic, gestion des bus, des groupes de piste, automation des effets, etc. Tout y est, ou presque. Et l’équipe de développement est très réactive. J’ai eu l’occasion de faire des rapports de bug qui ont très vite été pris en compte.
Plugins d’effet
Un logiciel de montage n’est rien sans des plugins efficaces et bien pensés. Ardour est livré avec quelques plugins très simples, qui font les choses habituelles (égalisation, réverb, etc.). Leur défaut principal est d’avoir une interface rudimentaire (Théo dit une interface informatique), alors que la plupart des plugins commerciaux proposent une interface qui ressemble à du matériel électronique : boutons à tourner, affichages digitaux, etc. Heureusement, il existe de nombreux plugins très bien faits, qui répondent à la plupart des besoins, et qui n’ont rien à envier aux solutions commerciales. Du moins ils comblent pleinement mes humbles besoin. Si vous cherchez quelque chose de ce type-là, regardez du côté des plugins dits lv2, et évitez les plugins LADSPA, qui viennent sans interface graphique.
Plugins Calf
Le premier ensemble de plugins que je vous inviterais à installer, ce sont les plugins proposés par le studio calf. Ils sont très très bien faits, très simple à prendre en main, et très bien documentés. Un simple parcours de la page principale du studio vous en convaincra. Pour ma part, j’ai beaucoup appris en regardant les vidéos proposées par l’équipe de Calf. Par exemple, la vidéo ci-dessous montre comment distordre des sons très simples pour en faire quelque chose de riche et complexe, à base de saturation, de réverbération, etc.
En allant loin dans l’utilisation de ces plugins, on peut par exemple mettre en place un vocoder au rendu très joli :
Guitarix
Ces premiers outils fournissent déjà beaucoup de possibilités, mais il arrive que l’on ait parfois besoin de « salir » le son, en l’amplifiant à la manière des amplis analogiques. Pour cela, les outils proposés par le projet guitarix offrent d’énormes possibilités.
ArtyFX
Le projet OpenAV développe une série d’outils pour le traitement sans latence du son : ArtyFX… Plutôt orienté live, ces outils peuvent également être utilisés comme outils dans ardour. Le manuel de ces plugins, disponible en français, donne une très bonne idée de l’ergonomie très bien pensée des outils…
Contrôle de la balance stéréo
Simuler une balance stéréo, cela implique de jouer à la fois sur le volume des deux pistes, mais aussi sur la différence de délai entre les deux canaux. Pour simuler ça, il m’arrive souvent d’utiliser le plugin stereo balance control de Robin Gareus. Vraiment impressionnant !
EQ10Q
Les outils d’égalisation de Calf sont très très bien. Il arrive aussi qu’on ait envie d’aller voir d’autres interfaces. EQ10Q est une alternative vraiment très belle et très facile à utiliser, qui fait aussi très bien son travail.
Plugins synthétiseurs
Il existe sous GNU/Linux de nombreux synthétiseurs de son. Pour la plupart, ils sont utilisables dans ardour, grâce au mécanisme des plugins. On créé une piste midi, on place des notes, puis on ajoute un plugin de synthèse de son, qui va interpréter les notes midi, et produire du son. Parmi ces outils, j’ai découvert récemment grâce aux superbes vidéos de Tobiasz Karoń le synthétiseur Helm, de Matt Tytel :
Le projet OpenAV, cité plus haut, propose lui aussi un synthétiseur, nommé sorcer. Je ne l’ai pas encore utilisé, mais il semble très intéressant.
Enfin, difficile de ne pas citer ZynAddSubFX, dont Tobiasz Karoń parle super bien, et qui semble hyper puissant…
Outils complémentaires
Jouer du son
Quand on a besoin de jouer du son en live, par exemple pendant une émission de radio, ou lors d’une soirée, on a là aussi pas mal d’outils à notre disposition. J’utilise depuis plusieurs mois le logiciel Mixxx, qui reprend les principes qui ont fait le succès du fameux Traktor : contrôle de la vitesse de passage des titres, détection des bpm, synchronisation des pistes, support des contrôleurs midi…
Analyse du son
J’avais déjà parlé ici de spek. C’est un outil super simple, mais rudement efficace, qui permet d’analyser un son en fréquence, à travers le temps. Indispensable à avoir dans sa caisse à outils…
Très simple à utiliser, il suffit de charger un son dans le logiciel, et voilà.
Conversion de format
Il arrive souvent que l’on ait à convertir du son : depuis du wav vers du mp3 pour une diffusion sur internet par exemple, ou encore depuis du flac vers du mp3, ou même depuis du mp3 vers du wav (car ardour ne supporte pas le mp3, c’est un choix des développeurs). Pour cela, j’utilise l’outil très simple sound converter, de GNOME. Je n’ai pour l’instant pas trouvé mieux. Il traite à la volée autant de fichiers que souhaité, en faisant une copie à côté des fichiers sélectionnés. De nombreux réglages sont possibles pour la qualité du format d’export. Le seul défaut du logiciel est qu’il faut aller dans les préférences pour ajuster ces paramètres : pas de réglages pré-établis pour les conversions usuelles…
Découpage de mp3
Le mp3 est un format de compression destructif du son : à chaque fois que l’on modifie un fichier mp3 et qu’on le sauve, il perd en qualité. Quand il s’agit d’extraire des parties d’un mp3, il existe heureusement des solutions pour ne pas détruire plus le son. J’utilise pour cela le logiciel mp3splt, qui a une interface graphique très simple et fonctionnelle, écrite en gtk.
Filtrage audio
Il y a peu, je suis tombé sur ce projet, que je n’ai pas encore eu l’occasion d’utiliser. Mais ça semble absolument génial. Il s’agit de faire de la séparation de source de manière interactive, en dessinant sur l’analyse spectrale d’un son. Le logiciel s’appelle ISSE, et c’est le résultat de la thèse d’Edward Diehl. Un outil à tester d’urgence ! Regardez la vidéo ci-dessous pour comprendre ce qu’est la séparation de sources, et ce que propose cet outil…
Conclusion
Voilà un petit tour personnel des outils existants sous GNU/Linux pour faire du son. Évidemment, j’ai présenté les outils que je connais, et je suis persuadé qu’il en existe de nombreux autres. Il faut aussi noter que le développement des logiciels libres pour la MAO est particulièrement dynamique ces derniers temps, et que ça risque de continuer à avancer toujours et encore… Restez vigilants, et lisez les actualités sur LinuxMAO pour vous tenir au courant !
Il existe dans la plupart des villes universitaires un IREM (Institut de Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques). À Clermont-Ferrand, je viens de rejoindre le groupe informatique sans ordinateur. Le principe du groupe est de concevoir des activités qui permettent à un enseignant de faire découvrir à ses élèves les fondements de la science informatique, mais sans passer par l’utilisation d’un ordinateur. Au menu des activités déjà réalisées : le binaire, les codes correcteurs d’erreurs, les automates, ou encore les algorithmes de tri.
Quand j’ai discuté pour la première fois avec l’équipe qui anime ce groupe de travail à l’IREM, je me suis demandé s’ils avaient envisagé d’adapter leurs activités pour des enfants déficients visuels. Et de fil en aiguille, c’est naturellement que j’ai eu envie de me lancer dans l’aventure…
Comme cette problématique d’adaptation des supports se rapproche un peu du savoir-faire des fablabs, et puisque les petits débrouillards Auvergne s’intéressent pas mal à la découverte de l’informatique sans ordinateur, nous avons décidé d’organiser une première soirée de réflexion autour du problème, dans leurs locaux.
Ça se déroulera donc lundi 13 novembre 2017, et c’est ouvert à toutes et à tous… Soyez les bienvenus !