On dit qu’en France le rapport à la langue est passionné. Mais il s’agit trop souvent de passions tristes. Ainsi, bon nombre de personnes prétendant défendre et aimer la langue française ne l’aiment guère : elles aiment leur propre élitisme, elles aiment une idée mythifiée de la langue, elles aiment avoir une rapport conservateur au passé et elles savourent le fait d’attaquer certaines cibles. Mais en réalité elles détestent la langue française. Celle-ci, telle qu’elle est parlée, écrite, interrogée, enrichie, malaxée, bref, telle qu’elle existe, dans son immense diversité, ne les intéresse pas. Ces gens aiment une français qui n’a souvent existé que dans leur imagination ; en parler n’est souvent qu’un prétextes pour mieux dénigrer le présent – qu’il s’agisse de l’état présent de la langue, ou bien de l’état présent de toute la société car, comme nous l’avons montré, le rapport au français est éminemment idéologique et politique. Quand on parle de langue, très souvent, on parle d’autre chose.