Tiens, ça faisait longtemps que je n’avais pas poursuivi la série revue de lectures sur ce blog. J’avais commencé en septembre dernier avec l’idée de nourrir la réflexion autour de la création sonore.
Une des raisons, c’était bien sûr de préparer au mieux l’atelier du SUC consacré à la réalisation d’une balade sonore. La semaine dernière, c’était d’ailleurs l’inauguration de la balade réalisée par les étudiants dans le cadre des sonographies. Même si beaucoup de choses seraient à revoir dans l’animation de cet atelier, j’ai été très content d’accompagner ces jeunes dans la découverte d’une expression artistique pleine de possibilités.
J’ai bien sûr continué mes lectures en élargissant les thèmes au fil des rencontres et des discussions. Voici donc quelques titres pour compléter les lectures précédentes, sur des sujets assez vastes, mais qui je trouve alimentent bien la réflexion sur la question du son, et de la création sonore en particulier.
Le Groupe de Recherches Musicales – Cinquante ans d’histoire
Difficile de passer à côté du Groupe de Recherches Musicales (GRM) quand on s’intéresse à la création radiophonique. Pierre Schaeffer et tous les gens qui ont gravité dans cet univers ont exploré pendant plusieurs dizaines d’années l’univers du son. Cet ouvrage, que l’on doit à Évelyne Gayou, retrace au plus près cette aventure, permettant de comprendre les défis auxquels a été confronté ce groupe, l’étendue des innovations, le nombre de participants (Jean-Michel Jarre par exemple a bénéficié des formations proposées par le GRM). Avant d’avoir lu ce livre d’histoire, j’avais du mal à cerner l’étendue du GRM.
Penser la musique aujourd’hui, Pierre Boulez
Si d’un côté Pierre Schaeffer expérimentait la création musicale par l’expérimentation, Pierre Boulez explorait en même temps l’écriture musicale avec la méthode d’un algébriste, par génération de partitions à partir de motifs et de règles. J’ai tenté de me frotter à l’un de ses écrits fondateurs, Penser la musique aujourd’hui. J’avoue manquer de maîtrise dans le domaine musical pour appréhender correctement les écrits, mais ma sensibilité mathématique est grandement satisfaite par les mécanismes et les idées développées.
Le paysage sonore, R. Murray Schafer
On confond souvent R. Murray Schafer avec Pierre Schaeffer. C’est une erreur que l’on ne peut plus faire quand on a fini de lire le paysage sonore. En effet, Schafer n’explore pas du tout la création musicale à partir des moyens technologiques de son temps, il s’intéresse au principe d’écologie sonore. Rédigé dans les années 70, cet ouvrage développe le concept de la pollution sonore, de l’importance des paysages sonores, il décortique la manière dont le son a traversé la construction culturelle de nos sociétés. On découvre aussi le travail de Schafer, qui a travaillé aux premiers projets d’enregistrement de sons à travers le monde.
En s’intéressant à cette démarche, on entre dans la bande des gens qui écoutent la ville, à la manière de ce que Gilles Malatray avait proposé au festival SONOR#9.
Politiques sonores
À la suite des cultural studies, le magazine Poli explore habituellement la politique de l’image. Pour un numéro, en 2015, l’équipe s’est jointe à la Philarmonique de Paris pour proposer une étude des politiques sonores. On y parle du genre, de la ville, de terrains d’écoute. Une autre manière de comprendre le son, et la manière dont ils marquent nos sociétés.
Prêter l’oreille
Peter Szendy propose ici la retranscription d’une conférence proposée à des enfants autour de l’écoute. On y rencontre plein d’idées intéressantes, comme par exemple l’existence d’une voix de l’intérieur que l’on entend quand on lit un texte. Un texte rafraîchissant.
Musique et technique
Publiée par l’ITEMM, la revue Musique et technique propose une promenade entre technique et musique. J’ai eu la chance de tomber sur ce numéro chez un bouquiniste. Chaque article de cette revue est un petit bijou pour le curieux du son : étude de la forme des premiers archets à travers l’iconographie, analyse linguistique du discours des musiciens et accordeurs de piano (où l’on apprend qu’aigu ne veut pas dire la même chose pour tout le monde), ou encore étude de la qualité sonore d’une guitare électrique. Une telle revue ne pouvait venir que du Mans.
La phonétique
Les que sais-je sont souvent des petits bijoux. Le moyen rapide et efficace d’explorer un sujet, en profitant de l’état de l’art des connaissances dans le domaine. J’ai beaucoup aimé lire celui consacré à la phonétique, qui s’intéresse non seulement aux techniques de notation, mais aussi à l’anatomie, aux aspects culturels associés. On apprend par exemple que l’oreille de l’enfant s’accoutume très tôt à sa langue maternelle, au point de très vite ne plus être capable de différencier des sons pourtant différents, mais qui ont le même sens dans sa langue.
Le bruit
Bien qu’un peu ancien, ce que sais-je consacré au bruit explore les différents outils que la société a mis en place pour mesurer, réduire, ou modifier le bruit ambiant. L’ouvrage commence par une introduction très accessible de ce que sont les sons, et permet de comprendre combien il est dur de mesurer de manière absolue ce qu’est le son, alors que notre échelle de mesure (l’oreille) sait s’adapter à beaucoup de situations.
L’audition
Ce que sais-je date des années 90. Il fait l’état des connaissances sur la manière dont le système auditif fonctionne, en évoquant également l’histoire de nos connaissances sur ce sens. On découvre que nos savoirs sont encore assez flous sur le rôle que joue le cerveau dans la mesure de ces sons. Le fonctionnement de chaque partie du système auditif est détaillé, on fait le lien entre phénomène physique et sensation. Essentiel pour commencer à faire le lien entre physique et perception.
4 thoughts on “Revue de lecture : bruit, musique, sociologie”