Quand on est non voyant, le nombre de jeux disponibles est nettement réduit, et souvent on ne peut pas jouer à armes égales… Heureusement, comme les pratiques de jeux de société explosent depuis quelques années, les éditeurs et les associations deviennent de plus en plus sensibles à ces questions. On peut penser par exemple à l’excellente association AccessiJeux, qui fait un travail remarquable sur internet. Mais parfois, ce qu’ils proposent ne correspond pas aux besoins spécifiques.
Un jour, par hasard, j’ai découvert les adaptations et créations de jeux proposées par le Centre pédagogique pour élèves handicapés de la vue, basé en Suisse. Et en particulier, leur qui es-ce ? tactile.
Après quelques hésitations, et pas mal de réflexions, je me suis lancé dans la réalisation d’une version locale. C’est un gros chantier, car pour chacun des personnages, on doit réaliser trois copies : une pour chaque joueur, plus une pour la pioche. J’ai donc pas mal discuté autour de moi, et nombre d’idées intéressantes sont venues enrichir le projet. En vrac, voici quelques idées :
- utiliser des boules de polystyrène pour former les têtes, des petits bâtons de bois plats pour le pied (similaires à des bâtons de glace). On utilise de la colle cyanolite (type super glue) pour fixer les différents éléments.
- utiliser de la laine, de la feutrine pour les cheveux et la barbe. Pendant plusieurs jours, j’ai hésité pour la fabrication des cheveux, et finalement, une piste semble intéressante : fabriquer des perruques à l’aide d’un collant à travers duquel on faufile des brins de laine. Il semble en effet beaucoup plus simple de coller une telle perruque sur la boule plutôt que chaque brin…
- utiliser des boutons plats, coupés en deux pour former les deux demies lunes des oreilles.
- utiliser de la peinture volumique pour former la bouche.
- coller une perle ou des aiguilles à bâtir avec une boule de plastique pour le nez.
- écrire en braille et en noir sur le bâton le nom du personnage, pour pouvoir poser la question finale (« est-ce que ton personnage est… »).
- fabriquer quelques accessoires, comme des lunettes et des chapeaux.
- utiliser des yeux mobiles en plastique, formés d’une petite bulle en plastique transparent, et d’une perle mobile noire à l’intérieur… Ça fait du bruit en secouant, et il en existe de plusieurs tailles.
- usiner deux supports de jeux dans lesquels il sera facile de repositionner les personnages… Je pense à des emplacement adaptés aux formes des bâtons de bois, qui seraient resserrés au fond, mais en forme d’entonnoir pour que le positionnement ne soit pas trop dur, avec peut-être un rail de positionnement. À réfléchir.
Après avoir commencé à rassembler le matériel, j’ai fait quelques essais : petits et grands yeux (ça marche), fixer le bâton dans une boule, y écrire en braille et en noir le nom du personnage (ça marche)…
Et puis il faut respecter l’équilibre des attributs, de sorte que le jeu ne soit pas trop facile, trop déséquilibré. Dans le jeu classique, il y a 21 personnages, et chaque critère est équilibré non pas en 50/50, mais plutôt en 5/16, pour éviter une recherche dichotomique trop rapide. Nous avons donc commencé à construire les critères, pour les attribuer aux personnages. L’outil est encore perfectible, mais il contient déjà une synthèse permettant de visualiser si un personnage est trop banal, ou au contraire réunit trop de caractères rares.
Le début d’une grande aventure !