J’ai vécu cette semaine au boulot quelque chose de vraiment extraordinaire. Vous allez me dire, il est ingénieur de recherche en informatique, il doit pas vivre grand chose de palpitant, et un simple changement du disque dur de sa machine il doit déjà trouver ça impressionnant.
Et bien détrompez-vous, je pense avoir vraiment assisté à une journée mémorable. Tout a commencé à 8 heures. J’avais rendez-vous devant le bureau du professeur en neurochirurgie qui encadre mes travaux de recherche. Nous avons traversé le service de neurochirurgie, puis après avoir traversé une porte sécurisée par un digicode, nous avons passé des sur-chaussures…
Vous me voyez venir là ?
Bon je continue. Nous avons de nouveau traversé une porte à digicode, qui nous a mené dans un vestiaire. Changement de vêtements pour des pyjamas désinfectés, passage d’un masque, d’une protection des cheveux, et de 2 nouvelles paires de sur-chaussures…
C’est bon, là, vous avez trouvé ?
Ensuite, nous sommes entrés dans le bloc, il devait être 8h15. Nous n’en sommes ressortis qu’à 17 heures. J’ai assisté à une opération de neurochirurgie (on dit neurochir” quand on est in). C’est quelque chose de très impressionnant. Je travaille avec ce neurochirurgien au développement d’une application de visualisation de la surface corticale en 2 dimensions, calculée à partir d’IRMs. Pour l’instant, il n’utilise que les IRMs fonctionnels et anatomiques bruts pour préparer son intervention. la première partie de la matinée a donc consisté à recevoir les IRMs acquis un peu plus tôt de l’autre côté de Clermont. Ça a commencé avec un plantage de l’ordinateur de traitement et de visualisation des IRMs (un UNIX HP, impossible de se reloguer par manque de place sur le disque dur, appel au service après-vente du système clé en main pour un dépannage alors que la patiente arrivait). Premier indice d’une intervention qui allait cumuler les complications. Les informations fonctionnelles ont été acquises difficilement par le centre IRM, qui a dû les apporter sur poster au lieu d’envoyer les versions électroniques. La localisation de l’intervention a encore été compliquée.
En fin de matinée, la patiente endormie, le neurochirurgien a pu entamer la phase chirurgicale (attention âmes sensibles): découpe de la peau sur un côté de la tête, en traçant un U de 6 sur 6 centimètres environ, décollage de la peau. On voit alors la fine pellicule qui recouvre la peau. Celle-ci est découpée également, puis intervient l’une des phases les plus impressionnantes : perçage aux 4 coins avec une fraise de l’os du crâne, puis utilisation d’une scie électrique pour finir d’ôter le carré d’os (la fenêtre). La dure mère est alors apparue. Elle a rapidement été maintenue par quelques fils à l’os, afin d’éviter qu’elle ne s’enfonce.
L’étape suivante était plus compliquée : pause d’une grille d’électrodes sur la dure-mère, puis simulation des zones pour déterminer l’endroit où poser les électrodes. Les appareils de mesure font alors foison, tous plus ou moins complexes.
Une fois cette localisation effectuée, la pause des électrode se fait par couture sur la dure-mère. Puis l’os est remis en place, on comble les trous dûs au découpage par les débris d’os récoltés précieusement lors de la découpe. La peau est alors recousue succintement, et tout le champs opératoire est refait depuis le début : une seconde opération est entamée, pour placer la pile dans une poche sous la peau, au niveau de l’omoplate. Le câble reliant les électrodes à la pile passe alors sous la peau.
La dernière étape de l’opération est de recoudre proprement chacune des parties de la peau ouverte : le passage pour la pile, et la peau du crâne.
J’ai été fortement impressionné par tous les aspects anatomiques (se trouver à 2 mêtres d’un cerveau quasiment à nu est vraiment flippant), mais aussi par l’efficacité de l’équipe médicale, par le sang-froid et la précision du neurochirugien, et par le respect strict de la zone propre où seul le chirurgien et l’infirmière propre peuvent évoluer. J’ai vraiment crains de ne pas être à la hauteur, et de devoir sortir en cours d’opération. Mais finalement l’intérêt scientifique l’a emporté, et je ne le regrette vraiment pas. Je crois que je m’en rappelerais longtemps.
Alors, JM, je viens prendre de tes nouvelles suite à ton mail. Et qu” est ce que j’apprends, Notre JM national a assité à une opération chirurgicale. A quand le diplome de medecine ?
Etait-ce une intervention pour la maladie de Parkinson ? Si c’est pour cette pathologie est-elle efficace ????
La personne qu’il a opéré souffrait d’une paralysie partielle, mais surtout de fortes douleurs. C’est pour tenter de diminuer ces douleurs dans les membres paralysés que l’intervention a été réalisée. Dans le cas d’une maladie de Parkinson, on utilise une stimulation profonde, c’est-à-dire que l’électrode n’est pas placée en surface, mais descend au coeur du cerveau.
Je ne connais pas l’efficacité de ce genre de traitement d’un point de vue statistique, mais certaines personnes ont complètement perdu leurs tremblements, ça semble donc être efficace pour un certain nombre d’entre eux.
On peut donc souffrir d’un membre paralysé ? Mais en cas d’AVC majeur souffre t’on physiquement ? Quand on est tétraplégique par exemple, souffre t’on physiquement en plus de l’incapacité à se mouvoir ?
Il semble que ce soit possible oui. J’avoue ne pas bien connaitre, je n’ai pas de formation médicale. C’est notamment le cas pour les personnes qui ne sont pas paralysées de naissance. Mais il est probable que ce soit généralisable, la sensation et la capacité à se mouvoir ne fonctionnent pas de la même manière…
J’ai vu, il y a quelques temps, un reportage à la TV où le même genre d’opération était pratiquée.
Déjà, à la TV, c’était relativement impressionnant alors en vrai, je comprends que cela puisse être carrémént déroutant…