Cela fait quelques années maintenant que nous sommes accompagnés par l’Équipe ressource de soins palliatifs pédiatriques Auvergne (ESPPA). C’est un dispositif intégré au CHU, et animé par des professionnel·le·s de santé qui apportent leur expertise aux familles qui entourent une jeune personne concernée par une maladie grave.
On retrouve sur le site de l’ESPPA cette définition donnée par l’Organisation Mondiale de la Santé :
« Les soins palliatifs sont des soins actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif des soins palliatifs est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes mais aussi de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle »
Pourquoi je m’y intéresse
Ma fille est atteinte de la maladie de Batten, et son quotidien est traversés depuis quelques années par de nombreux défis médicaux, psychologiques ou encore cognitifs. Avoir rencontré tôt cette équipe de soins pédiatriques palliatifs (SPP) nous a permis d’améliorer notre rapport aux différents services médicaux et paramédicaux que nous rencontrions, nous a permis d’identifier sur notre territoire des professionnels ou des équipes compétents pour prendre en charge les besoins de ma fille. Elle nous permet aussi de préparer l’arrivée de nouveaux besoins, de réfléchir au quotidien pour faire les bons choix, afin que l’accompagnement médical ne soit pas uniquement vu par chaque professionnel depuis leur prisme, mais pour coordonner une prise en charge globale.
Bref, j’en avais déjà parlé quand j’évoquais le deuil blanc, je suis énormément reconnaissant à cette équipe pour son écoute, son attention et son expertise depuis qu’elle nous accompagne.
Un constat de méconnaissance et d’iniquité
En discutant avec d’autres familles concernées par des maladies lysosomales, en discutant avec des proches qui sont concernés par des maladies graves, évolutives ou terminales, et en évoquant avec eux les soins palliatifs, j’ai très tôt identifié deux phénomènes :
- L’idée de soins palliatifs fait peur, car elle est dans l’esprit de beaucoup de personnes associée à la fin de vie, à la mort. Quand on se bat au quotidien contre une maladie qui avance, on veut penser à maintenant, on veut trouver des solutions pour lutter contre la maladie, on veut penser à l’action, à la joie, à la vie. Et si on ne connaît que de loin les soins palliatifs, ils résonnent alors comme un épouvantail, un truc qui fait peur, à fuir.
- Souvent, les familles rencontrent les équipes de soins palliatifs très tardivement dans le parcours de santé. Souvent trop tard pour que ces dispositifs et ces équipes puissent réellement faire montre de leur pleine compétence, et ce d’autant plus qu’il faut apprendre à se connaître avant de pouvoir agir ensemble.
De mon côté, j’ai eu beaucoup de chance, car avant même que le poly-handicap ne s’installe dans le quotidien de ma fille, j’avais assisté à une présentation de Paliped, l’équipe de ressource en soins palliatifs pédiatriques d’Île-de-France, grâce aux liens que j’avais notamment consolidé avec les professionnels du CRDV, notamment en orientant mes sujets de recherche sur la question du handicap. J’avais donc très tôt compris que ces équipes seraient pour nous un atout indispensable. Et pour consolider cette connaissance, la Plateforme Handicaps Rares du Puy-de-Dôme a joué son rôle de mise en relation progressive, dans un moment où nos besoins d’accompagnement grandissaient, pour que nous commencions à échanger avec l’ESPPA.
Si j’ai conscience que nous avons eu beaucoup de chance et avons été très bien accompagnés, je suis convaincu que ce parcours ne devrait pas rester le fruit d’un ensemble de circonstances favorables : toutes les personnes concernées par cet accompagnement devraient en bénéficier. C’est donc pour cela que j’ai petit à petit mûri l’envie de travailler sur la question.
Une opportunité de financement
C’est notamment au sein de l’association Vaincre les Maladies Lysosomales que j’avais pu discuter de ces dispositifs de soins pédiatriques palliatifs, avec d’autres familles, mais aussi avec les salariés de l’association.
Et quand en 2025 le Fonds National pour la Démocratie Sanitaire (FNDS) a lancé un appel à projets national à destination des associations pour soutenir des projets renforçant l’accès à la santé, améliorant la qualité des prises en charge et prenant en compte la parole des usagers, l’idée de travailler sur l’accès aux soins palliatifs pédiatriques nous a paru naturel.
Tout en esquissant les idées d’un projet de recherche sur la question et en parcourant la maigre littérature scientifique sur la question, nous avons commencé à chercher un partenaire universitaire pour mener un travail de recherche.
Dans mon idée, il devrait être possible, en s’appuyant notamment sur les familles adhérentes ou sympathisantes à VML et concernées par les maladies lysosomales d’identifier les mécanismes et les conditions qui font que l’on accède plus ou moins facilement à ces dispositifs. La littérature proche — qu’elle concerne d’autres dispositifs médicaux ou d’autres territoires sur les soins palliatifs — laisse entendre que des conditions sociales, géographiques ou encore culturelles sont à l’origine de la grande disparité d’accès à ces dispositifs.
Au fil de l’été 2025, en diffusant une note d’intention sur notre projet de recherche, j’ai pu échanger avec plusieurs chercheurs et chercheuses en sciences humaines spécialisés sur la question de la santé et travaillant dans différentes disciplines : sociologie, droit, psychologues, médecine, anthropologie, biostatistique, bioinformatique, … Si le projet intéressait, il était difficile de confirmer un engagement pour ces chercheurs et chercheuses déjà fort engagées sur leurs propres projet.
C’est finalement Matthias Schell et Claire Pilet de la toute jeune équipe ESPPéRA du Centre Léon Bérard qui ont répondu positivement à notre proposition. Ensemble, nous avons monté un projet de recherche sur un an pour répondre à l’appel à projet du FNDS, et nous avons déposé en septembre notre proposition auprès du ministère de la santé.
Nous avons finalement appris fin novembre que notre proposition était retenue pour un financement d’une année. Le projet PA-LY-PRÉCOCE était donc lancé.
PA-LY-PRÉCOCE : un projet de recherche en 2026
Ce projet qui s’étalera sur toute l’année 2026 a donc pour ambition de :
- mieux comprendre les freins (organisationnels, culturels, territoriaux, informationnels…) à l’accès précoce aux soins palliatifs pédiatriques ;
- donner une place centrale à la parole des familles et, lorsque cela est possible, des enfants et des jeunes concernés ;
- identifier des leviers concrets d’amélioration, pour que les soins palliatifs puissent être proposés plus tôt, de manière adaptée et respectueuse des besoins de chacun.
Il s’agit d’un projet de recherche-action : la recherche qui sera menée par l’ESPPéRA en collaboration avec l’association VML devrait permettre d’aboutir sur des enseignements qui serviront à co-construire avec les familles des outils concrets pour améliorer l’accès à ces dispositifs. Comme toute activité de recherche, elle mènera également à des publications scientifiques, afin de consolider notre compréhension collective des freins à l’accès aux soins pédiatriques palliatifs dans le cas des maladies lysosomales et au delà.
Vous pouvez dès à présent trouver plus d’information sur le site de l’association, sur la page annonçant le projet. Vous y trouverez également l’offre de post-doctorat d’une année qui sera financé par ce projet, pour mener à bien les activités de recherche.
