Alors que le recours en appel contre l’expulsion du 5 étoiles n’a pas porté ses fruits, on sait maintenant que le préfet demandera l’expulsion du squat début mai. Une décision à la fois difficile à vivre pour les mineurs isolés étrangers (MIE), car ils vont se retrouver sans solution pour l’hébergement d’urgence, mais surtout une décision qui rappelle combien l’état n’assume pas ce qui devrait être de sa responsabilité : l’accueil de ces jeunes, dans la dignité et le respect du droit international.
À Clermont-Ferrand, l’aide sociale à l’enfance est complètement dépassée, le département ne se donnant pas les moyens humains d’assurer un service public décent : des jeunes qui font la queue dès 5 heures du matin pour espérer être parmi les 20 personnes à être reçues dans la journée, à qui on ne donne même pas de tickets de transport pour rejoindre les établissements où ils ont été scolarisés, aucun moyen pour les fournitures, des jeunes qui doivent jouer de la débrouille pour manger à leur faim… Mais on a trouvé la solution qui va régler tous les problèmes : déléguer l’évaluation de la minorité des mineurs isolés étrangers à une association, comme c’est déjà pratiqué par exemple à Toulouse avec le DDAEOMI…
Et pendant que chaque département peine à mettre en place des solutions d’accueil correctes, l’état décide de durcir la traque, en mettant en place un fichier national de suivi de ces jeunes, le conseil constitutionnel valide l’utilisation des tests osseux pour statuer sur la minorité, et on prépare une nouvelle loi pour durcir encore le non accueil de ces jeunes…
En lisant la proposition de loi proposé le 20 février 2019, on y apprend en vrac que :
- l’état pourrait reprendre en charge l’évaluation de la minorité des MIE.
- le juge sera ainsi contraint de refuser l’admission à l’aide sociale à l’enfance à un demandeur qui refuse la réalisation des examens radiologiques osseux pour la raison évidente qu’en réalité, il n’est pas un mineur non accompagné.
- dans le cadre de l’évaluation de la situation des MIE, les documents présentés comme des actes d’état civil faits en pays d’étranger ne feront plus foi et ne permettront plus d’établir de façon certaine l’état civil de celui qui le produit.
Depuis presque un an que SAJE accompagne les mineurs isolés étrangers, force est de constater que le quotidien de ces jeunes devient intenable : délais de prise en charge avant évaluation qui peuvent durer plusieurs semaines à certains moments de l’année, hébergement dans des « hôtels » marchands de sommeil dont certains ont des accords spécifiques avec le département pour bénéficier de tarifs outranciers, rejet quasi systématique des demande de reconnaissance de la minorité après plusieurs mois d’attente, avocats et juges pour enfants qui ne sont pas en nombre suffisants pour que les dossiers de reconnaissance de minorité avancent à bonne vitesse, incapacité à proposer aux jeunes une scolarité correspondant à leurs savoir-faire et leurs envies…
La machine à broyer était déjà bien opérationnelle, mais la suite semble encore moins humaine…